Conférence et table ronde sur les mondes virtuels : enjeux, opportunités et défis

Les annonces de grandes entreprises se multiplient, nous apprenant le lancement de mondes virtuels couplé à des investissements d’un ordre de grandeur jamais égalé dans le domaine du numérique. Face à ce phénomène, les chercheurs et chercheuses de l’Université de Fribourg se sont associés à Fribourg International afin d’éclairer la thématique sous différents angles et de lancer la discussion.

Philippe Gumy, directeur adjoint de la Chambre de commerce et d'industrie du canton de Fribourg nous livre un excellent résumé de cet évènement :

"Le train du métavers roule déjà à vive allure." Olivier Curty, président du Conseil d'Etat, en charge de l'économie et de la formation, a été clair sur les enjeux, mercredi 5 octobre à l’Université de Fribourg : si le futur environnement numérique reste encore incertain quant à sa forme exacte, sa concrétisation sous la forme d'univers virtuels persistants interopérables ou les humains y interagissent au travers d'avatars ne fait guère de doute. Autant s'y intéresser tout de suite.

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Un avis partagé par Olivier Vavasseur, président de Fribourg International (FI), qui a rappelé les doutes qui émaillaient au début des années 2000 sur l'avenir du e-business, devant un auditoire de 150 personnes invitées conjointement par FI et l'Université de Fribourg et sa Faculté des Sciences économiques et sociales (SES) emmenée par le professeur Thierry Madiès, en partenariat avec la CCIF et la Promotion économique du canton de Fribourg.

Conférence et table ronde sur les mondes virtuels

Alors, le métavers, "juste une mode ?", a lancé Philippe Cudré-Mauroux, professeur d'informatique à l'Université de Fribourg. Certainement pas, a-t-il démontré dans la foulée, même si les métavers existant, comme Fortnite, n'en sont qu'à l'état embryonnaire. La technologie, la puissance de calcul manquent encore pour créer des métavers totalement immersifs. Mais ils seront opérationnels dans une dizaine d'années, a-t-il prédit, interrogé par Sophie Marenne, journaliste à L'Agefi, lors d'une table ronde. Plus de 120 milliards de dollars y ont déjà été investis et cela va continuer. La valorisation des métavers dépassera peut-être les 13'000 milliards de dollars à la fin de la décennie. Autant que l'actuel PIB de la Chine.

Les PME invitées à tester

"Les PME doivent organiser une veille et tester", a conseillé Delphine Seitiée, secrétaire générale l'Alp ICT, la plateforme de promotion du numérique soutenue par les cantons de Suisse occidentale et le Secrétariat d'Etat à l'économie. Reto Aeschbacher, directeur marketing chez Scott Sport SA confirme : "nous nous posons constamment la question : est-ce le moment de rejoindre le jeu ?" Dans le contexte d'après la pandémie, les gens semblent avoir davantage envie de réel, nuance-t-il. Mais le métavers reste dans le viseur de la multinationale basée à Granges-Paccot, pour laquelle plus de 50% du budget marketing va déjà dans le digital.
Le métavers ouvre de multiples questions : "qui en assurera la police, sera-t-il développé dans un esprit de liberté, comme le web à ses débuts, va-t-il exacerber les questions d'accessibilité", s'est interrogée Alexandra Feddersen, professeure au Département des sciences de la communication et des médias. Ce nouvel essor numérique ne va pas sans risques, dont celui de créer de nouvelles addictions, a pointé Aline Tiemann, du Département de psychologie. "Certaines personnes ne savent déjà plus identifier si elles ont vu un objet virtuellement ou réellement", a-t-elle par ailleurs fait remarquer. Autres risques : la mainmise de quelques grands groupes du numérique sur l'ensemble du métavers, et surtout de son public, sans parler de l'énorme consommation énergétique que va générer son développement, a souligné Delphine Seitiée.

Ne pas se focaliser uniquement sur les risques
Mais "aborder la thématique par ses dangers est un a priori très européen", a fait remarquer Philippe Cudré-Mauroux, qui n'en estime pas moins qu'il faut réglementer ces univers en amont. "Si on ne légifère pas, les grands groupes s'en occuperont. C'est une question politique : veut-on légiférer", a abondé Bruno Pasquier, avocat et professeur à Unidistance Suisse.

Et la fiscalité là-dedans, lorsque l'on sait que des transactions en dizaines de millions de dollars sont déjà effectuées dans ces métavers, dans le luxe, l'art ou l'achat de terrains, qui ne sont en fait que des fichiers numériques…? Les grands groupes prévoient 30 à 50% de dîme virtuelle, a noté le professeur Cudré-Mauroux. "Il faut cadrer les pratiques commerciales !" De quoi alimenter le débat sur l'imposition des géants du numériques, dont la réforme fiscale de l'OCDE prévoit une nouvelle répartition au niveau mondial dans son Pilier 1.

Si le métavers n'en est qu'à ses débuts, les défis qu'il soulève sont multiples… et bien réels. La table ronde interdisciplinaire du 5 octobre 2022 en a fait la démonstration.

Conférence et table ronde sur les mondes virtuels

De g. à d. : Sophie Marenne, Alexandra Feddersen, Philippe Cudré-Mauroux, Reto Aeschbacher, Delphine Seitée, Bruno Pasquier, Aline Tiemann 

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